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Les codes du roman policier

À mon défi littéraire (voir defi-litteraire) , vous avez voté pour la création d’un roman policier. Je me lance donc dans l’écriture d’un nouveau genre aux codes bien déterminés, mais cette fois, je me renseigne. Et je réalise que je pars déjà sur de mauvaises voies. Mais à quoi sert la littérature si l’on ne peut pas s’amuser un peu et dévier sur d’autres sentiers ?

Voici un aperçu de ce genre, par son histoire, ses codes et ses héros.

Sherlock Holmes, célèbre policier de la littérature.
Un célèbre policier de la littérature policière

Histoire

L’émergence du roman policier date du XIXe siècle, pendant la révolution industrielle. Il a progressé en parallèle avec une presse devenue abordable. Tout le monde peut acheter des journaux et la rubrique des faits divers passionne les lecteurs tout comme les feuilletons littéraires, remplacés au fil du temps par des récits policiers. Les journalistes sont souvent romanciers et lorsqu’ils écrivent leurs articles, ils mettent en scène les faits divers, les romancent (la classe populaire devient possiblement dangereuse à cette époque de pauvreté). Les récits d’enquête sont très appréciés. De plus, les percées technologiques permettent d’aborder les crimes d’une nouvelle manière.

Cependant, dans le recueil Les mille et une nuits, au Moyen Âge, on note déjà un récit qu’on pourrait qualifier de policier : Les trois pommes. Après avoir retrouvé le corps d’une jeune femme dans un coffre, le calife demande à son vizir d’enquêter.

Aujourd’hui, l’on pense que la lecture d’un roman policier est thérapeutique, tant c’est distrayant, tant le lecteur se sent impliqué.

Les éléments de base et les sous-genres

On compte 6 éléments de base :

Une victime, un coupable, un enquêteur, puis un mobile, un mode opératoire, une enquête. Tout le roman s’articule autour de cette enquête, de sa résolution. Mais à cette base, s’ajoutent de nombreuses règles qu’il est conseillé de suivre. Mais bien sûr, qui nous empêche de varier un peu ?

On compte également les sous-genres suivants :

  • Le roman policier historique ;
  • Le roman policier d’espionnage ;
  • Le roman policier humoristique ;
  • Le roman noir ;
  • Le roman à suspense ;
  • Le polar (un mélange de policier et de thriller) ;
  • Le polar ésotérique ;
  • Le roman policier de science-fiction ;
  • Le whodunit (Who has done it) : dans ce genre de récit-jeu, le lecteur dispose des mêmes indices que l’enquêteur et tente de découvrir le fin mot de l’histoire avant lui. C’est le policier classique.
  • Le thriller (qui peut aussi être considéré comme un genre à part).

Les règles du roman policier

Un document de base a été écrit par SS Van Dine qui relève 20 règles concernant le roman policier. Le nombre sera réduit à 10 par un écrivain britannique, Ronald Knox. Cependant, Jorge-Luis Borges a rédigé lui aussi les 19 lois du polar. Les règles sont donc assez nombreuses.

Les 20 règles du roman policier selon Van Dine, 1928.

  • 1. Le lecteur et le détective doivent avoir des chances égales de résoudre le problème. Tous les indices doivent être pleinement énoncés et décrits en détail.
  • 2. L’auteur n’a pas le droit d’employer vis-à-vis du lecteur des trucs et des ruses, autres que ceux que le coupable emploie lui-même vis-à-vis du détective.
  • 3. Le véritable roman policier doit être exempt de toute intrigue amoureuse. Y introduire de l’amour serait, en effet, déranger le mécanisme du problème purement intellectuel.
  • 4. Le coupable ne doit jamais être découvert sous les traits du détective lui-même ni d’un membre quelconque de la police. Ce serait de la tricherie aussi vulgaire que d’offrir un sou neuf contre un louis d’or.
  • 5. Le coupable doit être déterminé par une suite de déductions logiques et non pas par hasard, par accident, ou par confession spontanée.
  • 6. Dans tout roman policier, il faut, par définition, un policier. Or, ce policier doit faire son travail et il doit le faire bien. Sa tâche consiste à réunir les indices qui nous mèneront à l’individu qui a fait le mauvais coup dans le premier chapitre. Si le détective n’arrive pas la une conclusion satisfaisante par l’analyse des indices qu’il a réunis, il n’a pas résolu la question.
  • 7. Un roman policier sans cadavre. Cela n’existe pas […] Faire lire trois cents pages sans même offrir un meurtre serait se montrer trop exigeant vis-à-vis d’un lecteur de romans policiers. La dépense d’énergie du lecteur doit être récompensée.
  • 8. Le problème policier doit être résolu à l’aide de moyens strictement réalistes. Apprendre la vérité par le spiritisme, la clairvoyance ou les boules de cristal est strictement interdit. Un lecteur peut rivaliser avec un détective qui recourt aux méthodes rationnelles. S’il doit rivaliser avec les esprits et la métaphysique, il a perdu d’avance.
  • 9. Il ne doit y avoir, dans un roman policier digne de ce nom, qu’un véritable détective. Réunir les talents de trois ou quatre policiers pour la chasse au bandit serait non seulement disperser l’intérêt et troubler la clarté du raisonnement, mais encore prendre un avantage déloyal sur le lecteur.
  • 10. Le coupable doit toujours être une personne qui ait joué un rôle plus ou moins important dans l’histoire, c’est-à-dire quelqu’un que le lecteur connaisse et qui l’intéresse. Charger du crime, au dernier chapitre, un personnage qu’il vient d’introduire ou qui a joué dans l’intrigue un rôle tout à fait insignifiant, serait, de la part de l’auteur, avouer son incapacité de se mesurer avec le lecteur. 
  • 11 L’auteur ne doit jamais choisir le criminel parmi le personnel domestique tel que valets, laquais, croupiers cuisiniers ou autres. Ce serait une solution trop facile. […] Le coupable doit être quelqu’un qui en vaille la peine.
  • 12. Il ne doit y avoir, dans un roman policier, qu’un seul coupable, sans égard au nombre d’assassinats commis. […] Toute l’indignation du lecteur doit pouvoir se concentrer sur une seule âme noire.
  • 13. Les sociétés secrètes, les mafias, les camarillas, n’ont pas de place dans le roman policier. L’auteur qui y touche tombe dans le domaine du roman d’aventures ou du roman d’espionnage.
  • 14. La manière dont est commis le crime et les moyens qui doivent mener à la découverte du coupable doivent être rationnels et scientifiques. La pseudoscience, avec ses appareils purement imaginaires, n’a pas de place dans le vrai roman policier.
  • 15. Le fin mot de l’énigme doit être apparent tout au long du roman, à condition, bien sûr, que le lecteur soit assez perspicace pour le saisir. Je veux dire par là que, si le lecteur relisait le livre une fois le mystère dévoilé, il verrait que, dans un sens, la solution sautait aux yeux dès le début, que tous les indices permettaient de conclure à l’identité du coupable et que, s’il avait été aussi fin que le détective lui-même, il aurait pu percer le secret sans lire jusqu’au dernier chapitre. Il va sans dire que cela arrive effectivement très souvent et je vais jusqu’à affirmer qu’il est impossible de garder secrète jusqu’au bout et devant tous les lecteurs la solution d’un roman policier bien et loyalement construit. Il y aura toujours un certain nombre de lecteurs qui se montreront tout aussi sagaces que l’écrivain […] C’est là, précisément, que réside la valeur du jeu […]
  • 16. Il ne doit pas y avoir, dans le roman policier, de longs passages descriptifs pas plus que d’analyses subtiles ou de préoccupations atmosphériques. Cela ne ferait qu’encombrer lorsqu’il s’agit d’exposer clairement un crime et de chercher le coupable. De tels passages retardent l’action et dispersent l’attention, détournant le lecteur du but principal qui consiste à poser un problème, à l’analyser et à lui trouver une solution satisfaisante. […] Je pense que lorsque l’auteur est parvenu à donner l’impression du réel et à capter l’intérêt et la sympathie du lecteur aussi bien pour les personnages que pour le problème, il a fait suffisamment de concessions à la technique purement littéraire.
  • 17. L’écrivain doit s’abstenir de choisir son coupable parmi les professionnels du crime. Les méfaits des bandits relèvent du domaine de la police et non pas de celui des auteurs et des détectives amateurs. De tels forfaits composent la grisaille routinière des commissariats, tandis qu’un crime commis par une vieille femme connue pour sa grande charité est réellement fascinant.
  • 18. Ce qui a été présenté comme un crime ne peut pas, à la fin du roman, se révéler comme un accident ou un suicide. Imaginer une enquête longue et compliquée pour la terminer par une semblable déconvenue serait jouer au lecteur un tour impardonnable.
  • 19. Le motif du crime doit toujours être strictement personnel […] Le roman policier doit refléter les expériences et les préoccupations quotidiennes du lecteur, tout en offrant un certain exutoire à ses aspirations ou à ses émotions refoulées.
  • 20. Enfin, je voudrais énumérer quelques trucs auxquels n’aura recours aucun auteur qui se respecte, parce que déjà trop utilisés, et désormais familiers à tout amateur de littérature policière. L’auteur qui les emploierait ferait l’aveu de son incapacité et de son manque d’originalité. I La découverte de l’identité du coupable en comparant un bout de cigarette trouvé à l’endroit du crime à celles que fume un suspect ; II La séance spirite truquée au cours de laquelle le criminel, pris de terreur, se dénonce ; III Les fausses empreintes digitales ; IV L’alibi constitué au moyen d’un mannequin ; V Le chien qui n’aboie pas, révélant ainsi que l’intrus est un familier de l’endroit ; VI Le coupable frère jumeau du suspect ou un parent lui ressemblant à s’y méprendre ; VII La seringue hypodermique et le sérum de la vérité ; VIII Le meurtre commis dans une pièce fermée en présence des représentants de la police ; IX L’emploi des associations de mots pour découvrir le coupable ; V Le déchiffrement d’un cryptogramme par le détective ou la découverte d’un code chiffré.

A Lire :

Van Dine, S. S. (2006). Les 20 règles du roman policier. Québec français, (141), 60–60.

https://www.erudit.org/fr/revues/qf/2006-n141-qf1180056/50235ac.pdf

https://bibliobs.nouvelobs.com/en-partenariat-avec-books/20150213.OBS2499/les-19-lois-du-bon-polar-selon-borges.html

Les héros les plus connus

1819 : Mademoiselle De Scudéri, dans la nouvelle écrite par E. T. A. Hoffmann

1841 : C. Auguste Dupin, personnage d’Edgar Allan Poe qui apparaît dans Double assassinat dans la rue Morgue.

1887 : Sherlock Holmes, et son fidèle Watson, de Sir Arthur Conan Doyle, dans Une étude en rouge.

1907 : Rouletabille (Joseph Joséphin), de Gaston Leroux, dans le Mystère de la chambre jaune.

1907 : Arsène Lupin, de Maurice Leblanc, dans Arsène-lupin, Gentleman cambrioleur.

1920 : Hercule Poirot, héros d’Agatha Christie, dans La mystérieuse affaire de Style.

1930 : Miss (Jane) Marple dans L’affaire Protheroe.

1959 : Imogène, d’Exbrayat.

1992 : le commissaire Jean-Baptiste Adamsberg, dans la série du même nom, de Fred Vargas.

2005, Lisbeth Salander et Mikaël : Blomkvist, dans Millénium de Stieg Larson.

2006 : la série Verhoeven, de Pierre Lemaître.

2013 : la série du Capitaine Coste, d’Olivier Norek.

Pour aborder les romans plus récents, vous pouvez découvrir les séries de Lisa Gardner, les romans de Michel Bussi, Valentin ou Guillaume Musso, voire même Stephen king (que j’ai vu classé en policier, ce qui ne me paraît pas très juste), des auteurs qui permettent de hisser les ventes littéraires à un haut niveau.

Le genre policier a parfois été mal vu, mais le public est toujours présent, les ventes stables, voire même en augmentation.

Il existe un certain nombre de jeunes héros en littérature jeunesse

1942 : Le club des cinq, d’Enid Blyton.

1947 : Le clan des sept, d’Enid Blyton.

1961 : Fantômette, de Georges Chaulet.

1961 : Les six compagnons de Paul-Jacques Bonzon.

1971 : Sans Atout (ou François Robion), par le duo Boileau-Narcejac.

1989 : PP cul-vert de Jean-Phlippe Arrou-Vignod.

2006 : Les enquêtes d’Enola Holmes (sœur de Sherlock Holmes) de Nancy Springer.

2012 : Les enquêtes d’Anatole Bristol, de Sophie Laroche.

2020 : Néo, Michel Bussi.

Il me semble qu’il n’y a plus de grandes séries jeunesse qui proposent des enquêtes comme Le club des cinq, par exemple. J’ai bien pensé à Alex Rider, d’Anthony Horowitz, mais c’est plutôt une série d’espionnage. Vous pouvez peut-être me mettre au courant si vous en connaissez. Et si vous vous sentez une âme d’enquêteur, il y a un créneau à prendre !

Pour plus de héros : https://fr-academic.com/dic.nsf/frwiki/1032654

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