Mes chers passagers, voici 3 formules pour booster la créativité littéraire. Quand on écrit, on manque parfois d’imagination, ou l’on ne sait pas trop comment relancer la machine, donner plus d’élan à de superbes idées qui semblent se casser la figure au bout de quelques phrases. En vérité, vous ne devez pas lâcher l’idée, vous devez l’essorer. Et bonne nouvelle, plus elle est simple, plus on peut en tirer quelque chose. Ces astuces peuvent compléter un précédent article, 3 pratiques pour améliorer son écriture.
Et si
Pour commencer, c’est LA formule magique. Avec des si, on mettrait Paris en bouteille. Alors pourquoi pas ? Que ce soit pour des romans de l’imaginaire, ou plus réalistes, ça fonctionne toujours. On peut partir de zéro. D’ailleurs, ce pourrait être une première consigne. Et si on mettait Paris en bouteille ?
Ça m’inspire déjà :
Chaque jour, les habitants circulaient devant les parois de verre, affligés, égarés, d’autant plus que jamais ils ne voyaient ce qu’il se passait au-delà. L’univers se concentrait désormais dans cette bouteille d’un vert clair, donnant à la ville un air malade, selon l’humeur.
Clio, portant ses seize ans comme un sac de charbon, devait longer les bois. Les arbres immobiles s’emballaient parfois face à la réminiscence du vent et cognaient leurs cimes contre le plafond transparent. Cela faisait tressauter l’adolescente tout au long de son trajet.
Comment fait-on ?
Le Et si peut amorcer un récit et être utilisé tout au long de l’histoire.
- Et si Clio décidait de sortir de la bouteille ?
- Et si la bouteille se mettait à rouler ?
- Et si le feu prenait en ville ?
- Et si le manque d’air survenait petit à petit ?
- Et si certains habitants avaient trouvé la solution pour sortir ?
- Et si personne ne voulait jamais sortir ? Si c’était d’autres, qui voulaient rentrer ?
- Et si j’habitais dans cette bouteille ?
- Et si la tour Eiffel, les grandes tours, les grands immeubles avaient dû être rasés ?
- Et si les animaux avaient été évacués de l’autre côté des parois ?
- Et s’il n’y avait plus rien à manger ?
- Et si les animaux proliféraient, de l’autre côté ?
- Et si les humains vivaient dans un genre de zoo ?
Cette formule s’avère vraiment magique pour relancer l’histoire, donner des idées, aller plus loin, puisque chaque proposition peut être déclinée en d’autres propositions. Il ne faut pas hésiter à chercher l’absurde, l’originalité, au contraire.
On peut partir d’une situation quotidienne. Cela n’est pas adapté qu’au fantastique.
Exemple :
Mon voisin sort acheter du pain. Et si soudain il décidait de ne pas revenir ? S’il avait un secret qu’il cache depuis longtemps ? Si plus personne n’entendait parler de lui ? Si sa femme venait me demander de l’aide ? Et si je détestais sa femme ? Si j’aimais mon voisin ? Si j’habitais dans une ville si grande que tout le monde peut s’y perdre ? Si j’avais peur de cette ville ? Si je n’avais jamais quitté mon quartier ?
C’est à vous, mes chers passagers, de mettre Paris en bouteille !
Pourquoi ?
Nous retrouvons avec le pourquoi le même genre d’outil pour relancer une histoire, pour l’amener là où on ne pensait pas aller, mais en cherchant plus de cohérence, en bâtissant déjà la structure de notre narration. Le pourquoi pousse à réfléchir à la psychologie des personnages, à la crédibilité de leurs actions, de leurs objectifs, de leurs besoins. Ces questions peuvent être posées après les “Et si”, qui auront lâché les brides de notre imagination. Avec le pourquoi, on va donner du sens, ou du moins le chercher.
Si je reprends mes exemples précédents :
- Pourquoi a-t-on mis Paris en bouteille ?
- Pourquoi pas les animaux ?
- Pourquoi mon voisin est-il parti ?
- Pourquoi est-ce que je déteste sa femme ?
Bien sûr, les pourquoi peuvent être décortiqués, notamment quand a apporté une réponse :
Pourquoi est-ce que je déteste sa femme ?
Elle crie beaucoup, ne dit jamais bonjour, me regarde de haut.
Pourquoi crie-t-elle ?
Son mari est un peu sourd. Elle semble toujours en colère. Sa bonne humeur s’est fait la malle.
Pourquoi son mari est-il sourd ?
Il a eu un accident de travail, en lançant un feu d’artifice. Il est artificier.
Pourquoi pratique-t-il ce métier ?
C’est un rêve d’enfant, parce que son père l’était déjà, et qu’il aime voir les lumières dans les yeux des gens…
Ce pourquoi est essentiel pour dresser le portrait des personnages, parce que le pourquoi concerne surtout les gens. Parfois, voire la plupart du temps, on n’a pas la réponse, on va aller la chercher, l’inventer, et aller plus loin dans notre histoire, trouver des points d’appui pour notre progression narrative.
Allez, on fait ressortir son côté schizophrène pour discuter avec soi-même ! L’auteur est plusieurs.
Comment
Enfin, cette formule numéro 3 est peut-être plus difficile à utiliser et vient compléter les deux autres. Celles-ci soulevaient des idées, des pistes, des possibilités. Alors que Le Comment est plutôt là pour résoudre. Et parfois, il met à mort nos idées brillamment surgies des deux précédentes formules, parce qu’on n’a aucune solution proposée par notre Comment. Parfois, au contraire, ça relance des idées !
Si on reprend notre suggestion de Paris en bouteille, et le “Et si certains avaient trouvé le procédé pour en sortir ?” : l’auteur devrait bien entendu demander comment. Comment peuvent-ils sortir ? Comment ont-ils trouvé la solution ? Le lecteur attend des explications techniques ou magiques, en tout cas possibles et crédibles.
Mais aussi :
Comment vit-on dans un Paris en bouteille ?
Comment se nourrit-on ? Comment respire-t-on ? Comment les jeunes occupent-ils leurs journées ? Comment les forêts grandissent-elles ?
Comment Clio, seize ans, supporte-t-elle cette situation ? Et d’ailleurs, comment est cette personne ? Comment aborde-t-elle la vie en général ? Les gens en particulier ? Comment vit-elle (où, avec quoi, qui ?) ?
Vous l’aurez compris, le roman se met déjà en place avec ces questions. L’écrivain se les pose, y répond, et mène en bateau ensuite le lecteur qui n’obtiendra pas toutes les réponses d’emblée, mais qui se posera les mêmes questions.
Cette formule demande plus de réflexion, c’est la plus exigeante des trois, puisqu’elle engage l’action, des techniques, de la cohérence et le mouvement de nos personnages. Cependant, elle est essentielle. Mettre Paris en bouteille, d’accord, mais comment fait-on ?
Atelier :
L’arbre penchait tandis que Louis roulait sur la route.
Voici une phrase toute bête. Trouvez-lui 5 « Et si », 5 « pourquoi », 5 « Comment. »
Pour conclure
Lorsque des étudiants font un travail de recherche, on leur explique bien souvent que la réponse vient plus facilement quand on a la question. Les questions sont basiques, on parle du QQOQCP ou des 5 W en anglais. Qui, quoi, où, quand, comment, pourquoi. Quand on écrit un récit, on ne doit pas oublier de mobiliser ces puissants moteurs de recherche. La poésie pourrait se passer de ce questionnement, mais pas le roman. En atelier d’écriture, on secoue les méninges, et voici donc des outils tout trouvés pour donner au cerveau du grain à moudre. 3 formules pour booster la créativité littéraire à utiliser dès que possible. C’est à vous, passagers des mots !
Merci pr cet article ! Tu as bien résumé les étapes a mettre en place pr booster sa créativité ! Le Et si je l’aime bcp ! Il permet au cerveau de développer son imagination !
Oui, c’est magique ! C’est amusant, on peut aller très loin !